Dieu Existe
Je n’ai jamais été bon en histoire. J’attribue cette incompétence à mon désintérêt maladif pour tout ce qui me parait relever du détail. Toute chose qui arrive ne prend valeur pour moi que si je peux la rallier à une théorie englobante, à une sensation ou pensée transcendante qui dépasse l’instant pour plonger dans l’âme du monde. En cela mon esprit est, je dois bien l’avouer, profondément tourné vers l’imagination et le rêve. Je pense en romantique, je suis un idéaliste. Peut-être est-ce la raison pour laquelle je me rattache avec autant de force à des philosophies froides et matérialistes, pour contrebalancer ma tendance trompeuse à l’autosuggestion.
Il existe pourtant dans l’instinct et le rapport à l’absolu quelque chose qui s’accorde bien avec une pensée terre à terre. Je suis un religieux timide, un croyant qui s’ignore. Un anti-athée. Refuser Dieux en bloque, c’est fétichiser le langage, donner à un mot la force d’une définition figée dans l’ADN de l’univers. Dans le livre.
Les détails ne sont jamais figés. Ils évoluent et se transforment dans la totalité. Seule la totalité est éternelle, seule la totalité présente une réalité immuable, car tout mouvement s’effectue en son sein.
Dieu, dans sa définition la plus large m’apparait comme une manière de nommer cette totalité. Il porte d’autres noms : dharma, cosmos, tao. Nier l’existence de Dieu, du tao, du dharma, ou du cosmos, me parait étrange, instinctivement inconcevable.
Peut-on vivre le monde, le comprendre, sans laisser dans son cœur et se cerveau une place à Dieu ? Comprendre le monde par le langage, c’est accepter la nécessité de nommer l’absolue. Nier l’absolue, l’unité du monde, revient pour moi à un acte de mauvaise fois nihiliste, car toute séparation des choses est finalement relative.
Croire qu’il existe un tout dans lesquelles les choses se meuvent, c’est un acte de foi qui démarque le nihilisme totale du religieux. Entre les deux, il y a mille nuances de bavardage, et sans doute sont-elles passionnantes à leur propre manière. Je laisse le soin aux spécialistes d’en disserter dans le détail. Les détails ne m’intéressent pas. Je n’y peux rien. C’est mon plus grand manquement, la conséquence de ma foi.